Agenda_Sur la terre comme au ciel - Sur la Terre comme au ciel de Anath Ariel de Vidas et Patrick Deshayes
La fête patronale d’un village indien du nord-est du Mexique, donne l'occasion aux habitants de remémorer le miracle de l’apparition du maïs, après une longue et terrible sécheresse. Cette fête combine le culte catholique de la Vierge de l'Assomption, patronne du lieu, et le culte des entités de la terre qui consiste à déposer des offrandes opulentes au sommet de la montagne où a eu lieu le miracle, ainsi qu'au pied de l'autel de l'église. Si les villageois ont bien conscience que leurs coutumes sont loin d’être "catholiques", ils affirment explicitement que la combinaison des cultes chrétiens et païens dans cette fête est la seule garante de leur bien-être individuel et collectif.
Fruit d’une collaboration entre Anath Ariel de Vidas (directrice de recherche au CNRS et membre du laboratoire Mondes Américains), anthropologue travaillant dans ce village depuis une vingtaine d’années et Patrick Deshayes (Professeur émérite à l’Université Lyon 2 et membre du laboratoire LESC / CNRS), anthropologue et cinéaste, ce documentaire suit les 9 jours de la fête. Il commence par les préparatifs et, notamment, l'organisation des habitants en comités de femmes et d'hommes pour mener à bien les travaux de la fête. La caméra suit alors les différentes étapes de la célébration dans l'église, les maisons, les espaces publics et l'espace environnant : décorations avec des matériaux naturels, rites catholiques et païens, prières, préparations culinaires, festins, musique, danses, processions, montée au sommet de la montagne... Elle capte aussi les pauses et les réflexions des protagonistes. Hommes et femmes, jeunes et anciens, paysans, spécialistes rituels, maîtres d'école… chacun·e à sa manière éclaire la place de sa foi dans ce dispositif et l'importance d'accomplir sans faille la fête et les offrandes.
Les actes rituels - catholiques et ceux qui sont adressés aux entités de la terre – ne sont pas vécus localement comme une contradiction. Il s’agit pour les villageois de combiner explicitement leurs pratiques païennes avec le culte catholique dans un acte qui pourrait prendre l’aspect d’une désobéissance eu égard aux autorités ecclésiastiques mais qui est aussi un acte d’obédience aux esprits de la terre dont dépend leur bien-être. Au-delà des oppositions entre "tradition » et « modernité", entre "continuité" et "acculturation", le film se concentre sur cette manière de combiner les crédos, soit le refus de l’exclusivité et donc de l’exclusion. Il s’agit de l'éthique singulière locale de la coexistence entre les humains, et entre eux et les autres entités, chrétiennes et païennes, qui peuplent leur environnement.
Réalisation : Anath Ariel de Vidas et Patrick Deshayes